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lente et correcte quatre lignes sur la feuille de papier portant en tête : Comité de salut public, signa, et passa la feuille et la plume à Danton ; Danton signa, et Marat, qui ne quittait pas des yeux la face livide de Cimourdain, signa après Danton.

Robespierre, reprenant la feuille, la data et la remit à Cimourdain qui lut :

an ii de la république.

« Pleins pouvoirs sont donnés au citoyen Cimourdain, commissaire délégué du comité de salut public près le citoyen Gauvain, commandant la colonne expéditionnaire de l’armée des côtes.

« Robespierre. — Danton. — Marat. »

Et au-dessous des signatures :

« 28 juin 1793. »

Le calendrier révolutionnaire, dit calendrier civil, n’existait pas encore légalement à cette époque, et ne devait être adopté par la Convention, sur la proposition de Romme, que le 5 octobre 1793.

Pendant que Cimourdain lisait, Marat le regardait.

Marat dit à demi-voix, comme se parlant à lui-même :

— Il faudra faire préciser tout cela par un décret de la Convention ou par un arrêté spécial du comité de salut public. Il reste quelque chose à faire.

— Citoyen Cimourdain, demanda Robespierre, où demeurez-vous ?

— Cour du Commerce.

— Tiens, moi aussi, dit Danton, vous êtes mon voisin.

Robespierre reprit :

— Il n’y a pas un moment à perdre. Demain vous recevrez votre commission en règle, signée de tous les membres du Comité de salut public. Ceci est une confirmation de la commission, qui vous accréditera spécialement près des représentants en mission, Philippeaux, Prieur de la Marne, Lecointre, Alquier et les autres. Nous savons qui vous êtes. Vos pouvoirs sont illimités. Vous pouvez faire Gauvain général ou l’envoyer à l’échafaud. Vous aurez votre commission demain à trois heures. Quand partirez-vous ?

— À quatre heures, dit Cimourdain.

Et ils se séparèrent.

En rentrant chez lui, Marat prévint Simonne Évrard qu’il irait le lendemain à la Convention.