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OFFRES DE SERVICE…

chagrin, cela se voit. Je ne voudrais pas que vous eussiez du chagrin. Qu’est-ce qu’il faut faire pour cela ? Puis-je servir à quelque chose. ? Employez-moi. Je ne vous demande pas vos secrets, vous n’aurez pas besoin de me dire, mais enfin je peux être utile. Je peux bien vous aider, puisque j’aide mon père. Quand il faut porter des lettres, aller dans les maisons, demander de porte en porte, trouver une adresse, suivre quelqu’un, moi je sers à ça. Eh bien, vous pouvez bien me dire ce que vous avez, j’irai parler aux personnes. Quelquefois quelqu’un qui parle aux personnes, ça suffit pour qu’on sache les choses, et tout s’arrange. Servez-vous de moi.

Une idée traversa l’esprit de Marins. Quelle branche dédaigne-t-on quand on se sent tomber ?

Il s’approcha de la Jondreite.

— Écoute… lui dit-il.

Elle l’interrompit avec un éclair de joie dans les yeux.

— Oh ! oui, tutoyez-moi ! j’aime mieux cela.

— Eh bien, reprit-il, tu as amené ici ce vieux monsieur avec sa fille…

— Oui.

— Sais-tu leur adresse ?

— Non.

— Trouve-la-moi.

L’œil de la Jondrette, de morne, était devenu joyeux, de joyeux il devint sombre.

— C’est là ce que vous voulez ? demanda-t-elle.

— Oui.

— Est-ce que vous les connaissez ?

— Non.

— C’est-à-dire, reprit-elle vivement, vous ne la connaissez pas, mais vous voulez la connaître.

Ce les qui était devenu la avait je ne sais quoi de significatif et d’amer.

— Enfin, peux-tu ? dit Marius.

— Vous avoir l’adresse de la belle demoiselle ?

Il y avait encore dans ces mots « la belle demoiselle » une nuance qui importuna Marius. Il reprit :

— Enfin n’importe ! l’adresse du père et de la fille. Leur adresse, quoi !

Elle le regarda fixement.

— Qu’est-ce que vous me donnerez ?

— Tout ce que tu voudras !

— Tout ce que je voudrai ?

— Oui.

— Vous aurez l’adresse.