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VII

stratégie et tactique.


Marius, la poitrine oppressée, allait redescendre de l’espèce d’observatoire qu’il s’était improvisé, quand un bruit attira son attention et le fît rester à sa place.

La porte du galetas venait de s’ouvrir brusquement.

La fille aînée parut sur le seuil.

Elle avait aux pieds de gros souliers d’homme tachés de boue qui avait jailli jusque sur ses chevilles rouges, et elle était couverte d’une vieille mante en lambeaux que Marius ne lui avait pas vue une heure auparavant, mais qu’elle avait probablement déposée à sa porte afin d’inspirer plus de pitié, et qu’elle avait dû reprendre en sortant. Elle entra, repoussa la porte derrière elle, s’arrêta pour reprendre haleine, car elle était tout essoufflée, puis cria avec une expression de triomphe et de joie :

— Il vient !

Le père tourna les yeux, la femme tourna la tête, la petite sœur ne bougea pas.

— Qui ? demanda le père.

— Le monsieur !

— Le philanthrope ?

— Oui.

— De l’église Saint-Jacques ?

— Oui.

— Ce vieux ?

— Oui.

— Et il va venir ?

— Il me suit.

— Tu es sûre ?

— Je suis sûre.

— Là, vrai, il vient ?

— Il vient en fiacre.

— En fiacre. C’est Rothschild !

Le père se leva.

— Comment es-tu sûre ? s’il vient en fiacre, comment se fait-il que tu arrives avant lui ? Lui as-tu bien donné l’adresse au moins ? lui as-tu bien dit la dernière porte au fond du corridor à droite ? Pourvu qu’il ne se