IX
Le fanal du château de Munckholm venait de s’éteindre, et, à sa place, le matelot entrant dans le golfe de Drontheim voyait le casque du soldat de garde briller de loin, comme une étoile mobile, aux rayons du soleil levant, quand Schumacker, appuyé sur le bras de sa fille, descendit comme de coutume dans le jardin circulaire qui environnait sa prison. Tous deux avaient eu une nuit agitée, le vieillard par l’insomnie, la jeune fille par des rêves délicieux. Ils se promenaient depuis quelque temps en silence, quand le vieux prisonnier attacha sur la belle jeune fille un regard triste et grave :
— Vous rougissez et souriez toute seule, Éthel ; vous êtes heureuse, car vous ne rougissez pas du passé, et vous souriez à l’avenir.
Éthel rougit plus fort, et cessa de sourire.
— Mon seigneur et père, dit-elle, embarrassée et confuse, j’ai apporté le livre de l’Edda.
— Eh bien, lisez, ma fille, dit Schumacker ; et il retomba dans sa rêverie.
Alors le sombre captif, assis sur un rocher noirâtre ombragé d’un sapin noir, écouta la douce voix de sa fille, sans entendre sa lecture, comme un voyageur altéré se plaît au murmure de la source où il puise la vie.