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Je voudrais qu’on trouvât tout simple qu’un rêveur,
Las des faux biens, qui n’ont qu’une ingrate saveur,
Cherche l’ombre et devienne une face tournée
Vers l’inconnu dont est pleine la destinée.
Je ne m’explique point qu’on ne comprenne pas
Qu’un homme, après avoir pris ses quatre repas,
Bu, mangé, dormi, dit des choses inutiles,
Goûté dans vingt journaux à tous les mauvais styles,
Et refait tous les riens que les gens graves font,
N’est point pour cela quitte avec le ciel profond.
Souvent, j’ai dit, pensif, les coudes sur ma table,
Qu’une chose appelée honneur est véritable,
Que l’âme est, et qu’il faut sur terre avant tout voir
Non le bonheur, ô noirs vivants, mais le devoir.
Et puisque vous parlez de rêveurs, sachez, hommes,
Qu’entre la libre Sparte et les lâches Sodomes,
Nous laissant le choix, calme, invisible, écoutant,
Dans l’abîme un songeur immense nous attend.
A l’homme la souffrance, à lui la patience.
J’affirme qu’une haute et juste conscience
Met tout en mouvement dans ces grands flots du sort
Dont nous sommes battus quand notre barque sort.
Sans cette probité suprême qui gouverne,
Le monde ne serait qu’une affreuse caverne