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Il proclamait le vrai sur la terre ; une lave
Sortait de son esprit qui délivrait l’esclave,
Et la femme, et le faible, et le pauvre inquiet,
Et l’aveugle ignorant, de sorte qu’on voyait
Devant sa flamme, hostile au mal, au crime, aux haines,
S’enfuir la vieille nuit traînant les vieilles chaînes.
Il était entouré des ruines du mal,
D’abus tombés, monceau formidable et fatal,
De droits ressuscités, de vertus retrouvées,
Et de petites mains d’enfants, vers lui levées.
Au lieu de dire : Grâce ! il disait : Il lé faut !
Il combattait la guerre, il tuait l’échafaud.
Père et frère, il donnait la vie, ôtait les maîtres.
Guetté, mais fort, trop grand, hélas ! pour croire aux traîtres,
Il marchait aussi pur que l’aube en floréal,
L’œil fixé sur ce ciel qu’on nomme l’idéal.
Subitement, il est tombé dans l’embuscade,
Et son cadavre est là sur une barricade.
Ce trépassé, sanglant, nu, mordant son baîllon,
Pâle, n’a même plus la gloire, ce haillon,
Et ses noirs assassins, de leur main lâche et fausse,
Creusent sous lui la nuit comme on creuse une fosse.

Décembre souriant, suivi de son Sénat,
A fait hommage aux rois de cet assassinat,
Les rois ont respiré cet encensoir fétide.
Et devant Fualdès mort, le juge est pour Bastide
Et le prêtre bénit Caïn tuant Abel.
Sous ta tiare d’or qui ressemble à Babel,
Et qui, de la Sixtine illuminant les voiles,

A plus de diamants que le ciel n’a d’étoiles,
Sur ta chaire, splendide et sacré tribunal,.