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III


LE POÈTE EST UN RICHE.


Nous avons des bonnes fortunes
Avec le bleuet dans les blés ;
Les halliers pleins de pâles lunes
Sont nos appartements meublés.

Nous y trouvons sous la ramée,
Où chante un pinson, gai marmot,
De l’eau, du vent, de la fumée,
Tout le nécessaire, en un mot.

Nous ne produirions rien qui vaille
Sans l’ormeau, le frêne et le houx ;
L’air nous aide, et l’oiseau travaille
À nos poëmes avec nous.

Le pluvier, le geai, la colombe,
Nous accueillent dans le buisson,
Et plus d’un brin de mousse tombe
De leur nid dans notre chanson.

Nous habitons chez les pervenches
Des chambres de fleurs, à crédit ;
Quand la fougère a, sous les branches,
Une idée, elle nous la dit.

L’autan, l’azur, le rameau frêle,
Nous conseillent sur les hauteurs,
Et jamais on n’a de querelle
Avec ces collaborateurs.