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» Pour voir si quelque perle ignorée avant nous
» N’est pas sous l’eau profonde ?

» Que sert de n’effleurer qu’à peine ce qu’on tient,
» Quand on a les mains pleines,
» Et de vivre essoufflé comme un enfant qui vient
» De courir dans les plaines ?

» Jouissons à loisir ! Du loisir tout renaît !
» Le bonheur nous convie !
» Faisons, comme un tison qu’on heurte au dur chenet,
» Étinceler la vie !

» N’imitons pas ce fou que l’ennui tient aux fers,
» Qui pleure et qui s’admire.
» Toujours les plus beaux fruits d’ici-bas sont offerts
» Aux belles dents du rire !

» Les plus tristes d’ailleurs, comme nous qui rions,
» Souillent parfois leur âme.
» Pour fondre ces grands cœurs il suffit des rayons
» De l’or ou de la femme.

» Ils tombent comme nous, malgré leur fol orgueil
» Et leur vaine amertume ;
» Les flots les plus hautains, dès que vient un écueil,
» S’écroulent en écume !

» Vivons donc ! et buvons, du soir jusqu’au matin,
» Pour l’oubli de nous-même,
» Et déployons gaîment la nappe du festin,
» Linceul du chagrin blême !

» L’ombre attachée aux pas du beau plaisir vermeil,
» C’est la tristesse sombre.
» Marchons les yeux toujours tournés vers le soleil ;
» Nous ne verrons pas l’ombre !