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D’ailleurs le ciel n’est pas tranquille ;
Les soucis ne leur manquent pas ;
L’inégal pavé de la ville
Fait encor trébucher leurs pas.
Et pourquoi ces honneurs suprêmes ?
Ont-ils des monuments eux-mêmes ?
Quel temple leur a-t-on dressé ?
Étrange peuple que nous sommes !
Laissez passer tous ces grands hommes !
Napoléon est bien pressé !

Toute crainte est-elle étouffée ?
Nous songerons à l’immortel
Quand ils auront tous leur trophée,
Quand ils auront tous leur autel !
Attendons, attendons, mes frères.
Attendez, restes funéraires,
Dépouille de Napoléon,
Que leur courage se rassure
Et qu’ils aient donné leur mesure
Au fossoyeur du Panthéon !


III

Ainsi, — cent villes assiégées ;
Memphis, Milan, Cadix, Berlin ;
Soixante batailles rangées ;
L’univers d’un seul homme plein ;
N’avoir rien laissé dans le monde,
Dans la tombe la plus profonde,
Qu’il n’ait dompté, qu’il n’ait atteint ;
Avoir, dans sa course guerrière,
Ravi le Kremlin au czar Pierre,
L’Escurial à Charles-Quint ;