ODE VINGTIÈME.
PROMENADE.
Voici les lieux chers à ma rêverie,
Voici les prés dont j’ai chanté les fleurs…
Ceins le voile de gaze, aux pudiques couleurs,
Où ta féconde aiguille a semé tant de fleurs !
Viens respirer sous les platanes ;
Couvre-toi du tissu, trésor de Cachemir,
Qui peut-être a caché le poignard d’un émir,
Ou le sein jaloux des sultanes.
Aux lueurs du couchant vois fumer les hameaux.
La vapeur monte et passe ; ainsi s’en vont nos maux,
Gloire, ambition, renommée !
Nous brillons tour à tour, jouets d’un fol espoir ;
Tel ce dernier rayon, ce dernier vent du soir
Dore et berce un peu de fumée.
À l’heure où le jour meurt à l’horizon lointain,
Qu’il m’est doux, près d’un cœur qui bat pour mon destin,
D’égarer mes pas dans la plaine !
Qu’il m’est doux près de toi d’errer libre d’ennuis,
Quand tu mêles, pensive, à la brise des nuits
Le parfum de ta douce haleine !