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XIV. Détail religieux

Un peu de religion peut se mêler à cette justice. Voici un détail :

Frédéric Morin était, comme Arnaud (de l’Ariège), un républicain catholique. Il pensa que les âmes des victimes du 4 décembre, brusquement jetées par la mitraille du coup d’État dans l’infini et dans l’inconnu, pouvaient avoir besoin d’un secours quelconque, et il entreprit cette chose laborieuse, faire dire une messe pour le repos de ces âmes. Mais les prêtres entendent garder les messes pour leurs amis. Le groupe des républicains catholiques, que dirigeait Frédéric Morin, s’adressa successivement à tous les curés de Paris ; refus. Il s’adressa à l’archevêque ; refus. Des messes pour l’assassin tant qu’on voudra, mais pour les assassinés, jamais. Prier pour des morts de cette espèce, ce serait un scandale. Le refus s’obstina. Comment se tirer de là ? Se passer de la messe eût paru facile à d’autres, mais non à ces croyants opiniâtres. Les dignes catholiques-démocrates en peine finirent par déterrer dans une toute petite paroisse de la banlieue un pauvre vieux vicaire qui consentit à chuchoter tout bas cette messe à l’oreille du bon Dieu, en le priant de n’en rien dire.