maines d’ici et vous avoir tous à la fois dans
mes bras et sur mes genoux[1].
Il a vu Pasages et fait des promenades dans les environs. Il écrit là quatre poésies qui seront publiées dans les Quatre vents de l’Esprit sous le titre : Promenades dans les rochers.
De Tolosa, le 9 août, nouvelle lettre
à Léopoldine :
Je pense à toi sans cesse ; il faut bien que
je t’écrive toujours.
L’Espagne l’éblouit :
Je te conterai tout cela, ma bien-aimée
fille, quand je serai au Havre et quand tu
seras à Paris. Cela remplira nos causeries
après dîner. Tu sais ces bonnes causeries qui
étaient un des charmes de ma vie. Nous en
ferons encore. Car je veux bien que tu sois
heureuse sans moi, mais moi je ne peux être
heureux sans toi. J’embrasse ton mari, et toi,
et lui, et toi encore[2].
Le 25 août, nous trouvons huit vers
datés de Cauterets : L’enfant voyant l’aïeule à filer occupée…
Ces vers parurent dans les Contemplations. À cette même
date, il adressait à Léopoldine ces lignes
remplies de l’espérance joyeuse de la
revoir prochainement :
Tu as maintenant deux Charles pour te rendre heureuse. Avant peu tu auras aussi ton père. Donc continue d’engraisser, de rire et de te bien porter. Rayonne, mon enfant, tu es dans l’âge.
Écris-moi maintenant à La Rochelle poste restante[3].
Le lendemain du jour où elle recevait cette lettre, Léopoldine faisait, le 4 septembre, une promenade en barque à Villequier avec son mari. La barque chavirait. La malheureuse jeune femme s’était noyée, et son mari, n’ayant pu la sauver, voulut mourir avec elle.
En septembre, Victor Hugo avait
écrit de Cognac à sa femme :
J’ai reçu à Luz une bonne petite lettre de
ma Didine chérie. Cette lettre était comme
toujours pleine de tendresse et de bonheur…
Dans peu, je serai des vôtres. Encore douze
ou quinze jours, et je vous embrasserai tous,
et nous serons réunis. Je vous raconterai
toutes mes aventures[4].
Le 8 septembre, Victor Hugo ignorait encore son malheur.
La note de l’édition Hetzel, que nous
avons reproduite comme conclusion du
voyage aux Pyrénées, relate en quelques
lignes la catastrophe de Villequier, et
rappelle les sombres pressentiments de
Victor Hugo dans l’île d’Oléron qui lui
apparaissait comme « un grand cercueil couché dans la mer ».
Comme on le pense bien, Victor Hugo à partir de ce
moment n’écrivait plus ses impressions,
mais nous sommes en mesure de donner
des détails exacts sur ce tragique retour.
C’est un souvenir bien ancien qui a été fixé dans des notes. Jules Simon et son fils Gustave Simon faisaient, en 1869, une excursion en Belgique, vers la fin de juillet. Ils étaient depuis quelques jours à Ostende lorsqu’ils reçurent de Victor Hugo l’invitation de venir dîner à Bruxelles, place des Barricades, le 7 août. Victor Hugo s’était engagé à aller au théâtre voir Patrie, et il les avait emmenés avec lui. Mais il dit à Jules Simon : « Cette soirée ne compte pas ; vous allez faire un tour en Belgique, promettez-moi que vous reviendrez place des Barricades. »
Jules Simon tint sa promesse et vint déjeuner avec son fils chez Victor Hugo le 16 août. Le poète aimait volontiers à raconter ses voyages. Il faut dire qu’il était un conteur charmant ; il avait de