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comme la grive aux bois. Donc, ô cher Parfait, veillez aux e, veillez aux i, veillez aux grives et gare aux grèves.

Notre ami H.[1] me paraît un peu ébouriffé des dix mille vers ; mais c’est la longueur de Jocelyn, et les Châtiments en ont sept mille. Ô hommes de peu de foi, laissez-moi bâtir ma grande pyramide.

Je ne dis pas cela pour vous, trois fois cher correcteur. À ce propos, insondable est comme infini, comme absolu, comme éternel, comme inconnu, comme ineffable ; un de ces mots que rien ne remplace, et qui doivent, par conséquent, revenir souvent. Il y a des mots qui sont comme Dieu au fond de la langue.

Remerciez mon excellent et cher L. P. pour son cri éloquent et indigné à propos du dithyrambe Waldor[2]. Le Sancho a-t-il parlé de l’expioulcheune ? Le National a été bien laconique, ce me semble. Voulez-vous leur donner ma nouvelle adresse. À Guernesey.

Je vous embrasse sur les deux joues.

La presse anglaise nous revient en masse. Il y a dans le Morning advertiser, dans le Daily News etc. d’excellents articles sur l’expulsion. — Comment se fait-il que le National n’en cite rien ?

Cette expulsion qui grandit l’exil et déshonore l’alliance anglo-française, est un fait immense.

Vous recevrez prochainement la dernière pièce et la préface. (2 pages)[3].


À Monsieur Jules Laurens[4].


Artiste-peintre, auteur du Voyage en Perse publié aux frais du gouvernement.
13, rue Bonaparte. Paris.


Guernesey, Hauteville-House.
15 9bre 1855.

Vous savez, sans doute, monsieur, que notre exode a recommencé. Me voici à la troisième étape de l’exil ; j’ai enjambé le bras de mer de Jersey à

  1. Hetzel.
  2. De 1830 à sa mort, en octobre 1870, Mélanie Waldor publia de nombreux romans, poèmes, drames et comédies. Toute dévouée à l’empire et fort protégée en haut lieu, elle ne pouvait que détester l’auteur des Châtiments ; le 26 octobre 1855 elle publia dans le Moniteur universel des vers où, à propos de la guerre de Crimée, elle accusait Victor Hugo d’avoir exalté les hauts faits de l’armée russe au détriment de l’armée française. C’était d’ailleurs faux, mais il fallait plaire à l’Élysée.
  3. Louis Barthou, Impressions et Essais.
  4. Inédite. — Jules Laurens, peintre et lithographe. Plusieurs de ses dessins ont été publiés dans un ouvrage intitulé : Voyage en Turquie et en Perse. Beaucoup de ses peintures et aquarelles ont eu un grand succès.