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Si je trouve quelque autre combinaison, comme de faire nommer Bonaparte dès les premières scènes et de renoncer à l’effet du nom inédit jeté à la fin, je vous la soumettrai comme un ami à un ami, ut decet. Et dans tous les cas on ne jouera Louis XVI, je vous le répète, que quand vous le voudrez, et jamais si vous le voulez.

Je me rappelle fort bien à présent que vous m’aviez dit votre idée et je trouve que la mienne y ressemblait, en effet, beaucoup. À vous donc toute priorité. C’est la première fois, je vous le dis sincèrement, que je me surprends en plagiat flagrant. Cela m’afflige. Est-ce que l’archevêque de Grenade baisserait déjà ?

D’ailleurs, votre vers est sublime et renferme une idée qui est la plus belle, et que je n’ai pas :

… Charles premier, je me nomme Cromwell.

Chez moi, rien de cette grandeur. Bonaparte ne dit pas le vers à Louis XVI, et Bonaparte n’est pas le régicide de Louis XVI.

Merci cent fois de votre bonne et généreuse lettre. Je ne veux pas que Strafford perde un cheveu, ni un vers, et je compte bien l’applaudir bientôt de toutes mes mains et de tous mes poumons.

À vous fraternellement.
Victor.


À Monsieur Cordellier-Delanoue.


30 septembre [1831].

Je vous remercie, mon cher Delanoue, de votre noble et cordiale lettre, comme d’une des plus chères preuves d’amitié que vous puissiez me donner ; mais je persiste. Louis XVI après Strafford. Ce que j’ai écrit, ce que je vous ai dit, ce n’était pas du bout des lèvres, mais du fond du cœur. Ma résolution était fermement prise, et au moment où j’ai reçu votre dernière lettre j’avais déjà abandonné Louis XVI pour une autre victime. À Strafford donc, mon ami ! Je l’aime comme je vous aime. Ce qui vient de votre cœur ira toujours au mien.

Victor.