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À Louis Noël[1].


[6 novembre 1830.]

Vous avez raison de compter sur mon amitié ; elle vous appartient en effet ; elle est à vous, vraie, cordiale, profonde. Du jour où je vous ai vu, ma sympathie vous a appartenu ; du jour où je vous ai connu, mon amitié vous a été acquise. Vous êtes, il est vrai, d’une noble, digne et excellente nature ; vous êtes fait pour être aimé sur une base d’estime.

Je vous remercie de la lettre que vous m’avez écrite, et qui nous a été au cœur. Ma femme en a été touchée aux larmes.

Cousin m’écrit que votre nomination est signée... J’ai voulu être le premier à vous l’apprendre. C’est une joie pour moi de penser que mon nom va se mêler à quelque chose d’heureux pour vous. C’est un chagrin aussi quand je pense que j’aurai contribué à vous éloigner de Paris. Mais patience ! je contribuerai, je l’espère, à vous y faire revenir. En attendant, soyez régent de philosophie et surtout philosophe.

Votre ami,
Victor Hugo[2]


À Madame Benjamin Constant.


6 novembre 1830.
Madame,

Votre malheur privé est une calamité publique. La perte qui vous frappe nous frappe tous. Permettez-moi de vous dire qu’il y aura demain au convoi de cet homme illustre au milieu du peuple qui le pleurera un cœur bien profondément affligé. Ce sera le mien, madame. Je n’ai vu que trop peu de fois M. Benjamin Constant[3]. Cependant, je crois pouvoir dire que je l’ai bien connu. C’était une de ces grande âmes qui tiennent trop de place

  1. Louis Noël fut nommé régent de philosophie au collège St-Omer, sur la recommandation de Victor Hugo.
  2. Louis Noël. Correspondance.
  3. Benjamin Constant, homme politique, orateur et publiciste. Son libéralisme intransigeant lui valut l’exil sous Napoléon Ier. Il laissa de nombreux écrits sur la politique et la religion, mais le plus connu de ses ouvrages est un roman : Adolphe.