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titre, partisan de la tolérance, en matières religieuses et politiques : je serais curieux de savoir ce qu’il pense de la tolérance en matière littéraire ?

En publiant ces observations sur la lettre proscrite, vous obligerez, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Victor Hugo[1].


À M. le Rédacteur du Journal des Débats.


Paris, 31 juillet 1824[2]
Monsieur,

M. Z… est beaucoup trop modeste : cela est fort embarrassant pour un pauvre auteur, qui a peut-être de bonnes raisons à alléguer, et que l’on condamne au silence, parce qu’il ne les expose pas assez brutalement. J’avais eu l’honneur d’adresser une petite lettre à M. Z… à l’occasion du petit avant-propos dont il avait assaisonné ma réponse, accueillie lundi dernier par le Journal des Débats. Cette lettre contenait, je l’avoue humblement, de nouveaux témoignages de ma profonde et inaltérable estime pour l’esprit, le talent et l’érudition de votre ingénieux collaborateur. Il est vrai qu’à ces justes éloges j’avais mêlé quelques timides observations, qui n’auront sans doute pas paru à M. Z… un correctif suffisant. Je lui faisais remarquer que je devais plutôt attendre de lui une réplique à ma réponse qu’un nouvel article sur mes odes ; je lui abandonnais d’avance ces compositions si vulnérables sous tous les rapports, ajoutant que lorsqu’il aurait très facilement prouvé que mes vers sont mauvais, il lui referait encore à démontrer que sa théorie sur les classiques et les romantiques n’est pas erronée, ce qui pourtant est le véritable point de la question. Je terminais en le priant de vouloir bien expliquer au public de quelle nature était l’ordre d’insertion qu’il affirmait avoir reçu de moi, ordre qui s’était borné à l’envoi pur et simple de ma lettre, absolument telle qu’on l’avait pu lire dans le « Journal des Débats » du 26 juillet. M. Z…, je le répète, n’a point vu dans ces observations un contrepoids suffisant aux louanges qui les accompagnaient. Un sentiment de pudeur littéraire, vraiment exagéré, l’a porté non seulement à refuser, à ma seconde lettre, la publicité que j’osais lui

  1. La Gazette de France, 12 août 1824.
  2. Le deuxième article de M. Z… avait paru ce même jour 31 juillet dans le Journal des Débats, il commençait ainsi :
    « M. Victor Hugo est beaucoup trop poli : cela est fort embarrassant pour un journaliste qui a de bonnes vérités à dire et que l’on condamne à l’inertie par des complimens plus adroits que sincères, comme on fait taire le chien à triple gueule en lui jetant des gâteaux emmiellés. »