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Ce soir, Pelletan[1] me fait dire, par son fils, Camille Pelletan, de la part du gouvernement, que la journée de demain sera décisive.


1er décembre. — Il paraîtrait que Louise Michel serait arrêtée. Je vais faire ce qu’il faudra pour la faire mettre immédiatement en liberté. Mme  Meurice s’en occupe. Elle est sortie pour cela ce matin.

D’Alton-Shée est venu me voir.

Au dîner nous avons mangé de l’ours.

J’écris au préfet de police pour faire mettre Louise Michel en liberté.

On ne s’est pas battu aujourd’hui. On s’est fortifié dans les positions prises.


2 décembre. — Louise Michel est en liberté. Elle est venue me remercier.

Hier soir, M. Coquelin est venu chez moi dire plusieurs pièces des Châtiments.

Il gèle. Le bassin de la fontaine Pigalle est glacé.

La canonnade a recommencé ce matin au point du jour.

Onze heures et demie. La canonnade augmente.

Flourens[2] m’a écrit hier et Rochefort aujourd’hui. Ils reviennent à moi.

Dorian, ministre des travaux publics, et Pelletan, sont venus dîner avec moi.

Excellentes nouvelles ce soir. L’armée de la Loire est à Montargis. L’armée de Paris a repoussé les prussiens du plateau d’Avron. On lit les dépêches à haute voix aux portes des mairies. La foule a crié : Bravo ! Vive la République ! Victoire !

Voilà le deux décembre lavé.


3 décembre. — Le général Renault, blessé au pied d’un éclat d’obus, est mort.

J’ai dit à Schœlcher que je voulais sortir avec mes fils si les batteries de la garde nationale dont ils font partie sortaient au-devant de l’ennemi. Les dix batteries ont tiré au sort. Quatre sont désignées. Une d’elles est la dixième batterie, dont est Victor. Je sortirai avec cette batterie-là. Charles n’en est pas, ce qui est bien, il restera, il a deux enfants. Je le lui ordonnerai. Vacquerie et Meurice sont de la dixième batterie. Nous serons ensemble au combat.

  1. Eugène Pelletan, homme de lettres, député (1863-1869), membre du Gouvernement de la Défense nationale ; devint membre de l’Assemblée nationale, puis sénateur. (Note de l’éditeur.)
  2. Gustave Flourens, professeur d’histoire naturelle au Collège de France en 1863 ; prit part à l’émeute du 31 octobre 1870 ; fut tué à la tête d’un bataillon de la Commune, à Rueil, le 3 avril 1871. (Note de l’éditeur.)