Page:Hugo Œuvres complètes tome 5.djvu/18

Cette page a été validée par deux contributeurs.

il serait temps de signaler le véritable motif de la mesure, le motif d’antichambre, le motif de cour, le motif secret, le motif qu’on ne dit pas, le motif qu’on n’ose s’avouer à soi-même, le motif qu’on avait si bien caché sous un prétexte. Ce motif a déjà transpiré dans le public, et le public a deviné juste. Nous n’en dirons pas davantage. Il est peut-être utile à notre cause que ce soit nous qui offrions à nos adversaires l’exemple de la courtoisie et de la modération. Il est bon que la leçon de dignité et de sagesse soit donnée par le particulier au gouvernement, par celui qui est persécuté à celui qui persécute. D’ailleurs, nous ne sommes pas de ceux qui pensent guérir leur blessure en empoisonnant la plaie d’autrui. Il n’est que trop vrai qu’il y a au troisième acte de cette pièce un vers où la sagacité maladroite de quelques familiers du palais a découvert une allusion (je vous demande un peu, moi, une allusion !) à laquelle ni le public ni l’auteur n’avaient songé jusque-là, mais qui, une fois dénoncée de cette façon, devient la plus cruelle et la plus sanglante des injures. Il n’est que trop vrai que ce vers a suffi pour que l’affiche déconcertée du Théâtre-Français reçût l’ordre de ne plus offrir une seule fois à la curiosité du public la petite phrase séditieuse : le Roi s’amuse. Ce vers, qui est un fer rouge, nous ne le citerons pas ici ; nous ne le signalerons même ailleurs qu’à la dernière extrémité, et si l’on est assez imprudent pour y acculer notre défense. Nous ne ferons pas revivre de vieux scandales historiques. Nous épargnerons autant que possible à une personne haut placée les conséquences de cette étourderie de courtisan. On peut faire, même à un roi, une guerre généreuse. Nous entendons la faire ainsi. Seulement que les puissants méditent sur l’inconvénient