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les contradictions dans lesquelles tombait l'accusé, et à mettre en relief l'invraisemblance de cette aventure. Il demanda comment les brigands avaient volé le beurre, et laissé le sac dans lequel il était renfermé ? Comment ils avaient respecté la petite fiole à tabac, et emporté la bourse brodée qui lui servait d'étui ? Quand il eut achevé son sévère interrogatoire, il ajouta malicieusement : — Je viens de faire quelques questions à mon frère, mais c'est par pure curiosité ; je n'y attache aucune importance. Ce n'est pas moi qui suis obligé de débourser pour lui acheter des provisions.

Samdadchiemba était affamé. Nous lui donnâmes quelques sapêques, et il alla dîner à un restaurant voisin. Aussitôt qu'il fut sorti, Sandara prit la parole : — On ne me persuadera jamais, dit-il, que mon frère a été pillé. Les brigands de ces pays-ci font les choses tout différemment. Samdadchiemba, en arrivant chez les Tartares, a voulu faire le généreux. Il a distribué ses provisions à droite et à gauche, pour se faire des amis. Qu'a-t-il à craindre à être prodigue ? Est-ce que ce qu'il donne lui coûte quelque chose ? — La probité de Samdadchiemba nous était assez connue pour nous faire mépriser ces méchantes insinuations. Sandara était jaloux de la confiance que nous accordions à son cousin. Il voulait, en outre, nous faire croire qu'il était sincèrement attaché à nos intérêts, et écarter par là les soupçons que nous pouvions avoir sur ses petites rapines. Samdadchiemba ne s'aperçut nullement de la perfidie de son cousin. Nous lui donnâmes de nouvelles provisions, et il repartit pour les pâturages de Koukou-Noor.