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Après une absence de cinq jours, M. Gabet fut de retour à la Maison de repos. Les affaires allaient pour le mieux : il avait fait à la lamaserie de Kounboun une véritable trouvaille ; il revenait accompagné d'un Lama âgé de trente-deux ans, et qui en avait passé dix dans une grande lamaserie de Lha-Ssa. Il parlait à merveille le pur thibétain, l'écrivait avec facilité, et avait une grande intelligence des livres bouddhiques ; de plus il était très-familiarisé avec plusieurs autres idiomes, tels que le mongol, le si-fan, le chinois et le dchiaour ; c'était en un mot un philologue extrêmement distingué. Ce jeune Lama était Dchiahour d'origine, et cousin-germain de Samdadchiemba ; son nom était Sandara ; dans la lamaserie on l'appelait Sandara-le-Barbu, à cause de sa barbe qui était d'une longueur remarquable. En voyant le dévouement que le cousin de Samdadchiemba se hâta de nous témoigner, nous nous applaudîmes de ne nous être pas aventurés avec la caravane des Tartares-Khalkas. Nous étions actuellement en mesure d'avoir sur le Thibet tous les renseignements désirables, et de nous instruire sur la langue et la religion de ces contrées célèbres.

Nous nous mîmes à l'élude avec une ardeur incroyable. D'abord nous commençâmes par composer en mongol deux dialogues où nous fîmes entrer les locutions les plus usuelles. Sandara nous les traduisit en thibétain avec une scrupuleuse attention. Tous les matins, il écrivait une page sous nos yeux, en nous rendant un compte à peu près grammatical de toutes les expressions : c'était notre leçon pour la journée ; nous la transcrivions plusieurs fois, pour rompre notre main à l'écriture thibétaine ; ensuite nous la chantions,