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nous invita souvent à nous recommander à la protection de la divine Providence. Nous marchions à travers d'énormes rochers, et le long d'un profond torrent dont les eaux tumultueuses bondissaient à nos pieds. Le gouffre était toujours béant devant nous ; il eût suffi d'un faux pas pour y rouler ; nous tremblions surtout pour les chameaux, si maladroits et si lourds quand il faut marcher sur un chemin scabreux. Enfin, grâce à la bonté de Dieu, nous arrivâmes sans accident à Si-Ning. Cette ville est immense, mais elle est peu habitée, et tombe presque en ruines sur plusieurs points. Son commerce est en grande partie intercepté par Tang-Keou-Eul, petite ville située sur les bords de la rivière Keou-Ho, à la frontière qui sépare le Kan-Sou du Koukou-Noor.

Il est d'usage à Si-Ning-Fou, on pourrait même dire de règle, qu'on ne reçoit pas dans les hôtelleries les étrangers tels que Tartares, Thibétains et autres ; ils vont loger dans des établissements nommés Maisons de repos (Sié-Kia), où les autres voyageurs ne sont pas admis. Nous allâmes donc mettre pied à terre dans une Maison de repos, et nous y fûmes très-bien reçus. Les Sié-Kia différent des autres hôtelleries en ce qu'on y est loge, nourri et servi gratuitement. Comme le commerce est le but ordinaire des étrangers, les chefs de ces établissements perçoivent un revenu sur tout ce qu'on vend ou qu'on achète. Pour tenir une Maison de repos, il faut avoir la permission des autorités du lieu, et leur payer annuellement une certaine somme, plus ou moins grande, suivant l'importance des affaires commerciales. En apparence, les étrangers sont très-bien traités, mais au fond ils sont toujours sous la dépendance