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qui s'élève au milieu d'une plaine assez vaste, mais presque stérile. Il n'y vient qu'un peu d'orge grise, et quelques maigres herbes, qui servent de pâturages à de chétifs troupeaux de chèvres et d'yaks. Vue de loin, la ville a mine de quelque chose ; deux grandes lamaseries, richement peintes et dorées, qui sont construites tout-à-fait sur le sommet de la colline, lui donnent surtout un aspect imposant. Mais, quand on parcourt l'intérieur, on ne trouve que des rues laides, sales, étroites, et tellement inclinées, qu'il faut avoir les jambes bien façonnées aux routes des montagnes pour ne pas perdre l'équilibre à chaque pas.

En deçà du grand fleuve à sable d'or, on remarque, parmi les tribus qu'on rencontre, une assez notable modification dans les mœurs, le costume et le langage même. On voit qu'on n'est plus dans le Thibet proprement dit. A mesure qu'on se rapproche des frontières de la Chine, les indigènes ont moins de fierté et de rudesse dans le caractère ; on les trouve déjà un peu cupides, flatteurs et rusés ; leur foi religieuse n'est plus même ni si vive ni si franche. Quant au langage, ce n'est plus le thibétain pur qui se parle à Lha-Ssa et dans la province de Kham : c'est un dialecte qui tient beaucoup de l'idiome des Si-Fan, et où l'on remarque plusieurs expressions chinoises. Les Thibétains de Lha-Ssa qui nous accompagnaient avaient toutes les peines du monde à comprendre et à être compris. Le costume ne varie en général que dans la coiffure. Les hommes portent un chapeau de feutre gris ou brun, ressemblant assez à nos chapeaux de feutre, lorsqu'ils sortent du fouloir, et qu'ils n'ont pas encore été arrondis sur la forme. Les femmes fabriquent avec leurs cheveux une