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toutes parts ; les animaux devenaient plus nombreux ; tout annonçait que nous avancions rapidement vers des climats plus tempérés ; les cimes seules des montagnes avaient encore conservé leurs couronnes de neige et de glaçons.

Quatre jours après notre départ de Kiang-Tsa, nous arrivâmes sur les bords du Kin-Cha-Kiang, fleuve à sable d'or (1)[1], que nous avions déjà traversé sur la glace avec l'ambassade thibétaine deux mois avant d'arriver à LhaSsa. Au milieu des belles plaines de la Chine, ce fleuve magnifique roule ses ondes bleues avec une imposante majesté ; mais parmi les montagnes du Thibet, il bondit sans cesse, et précipite la grande masse de ses eaux au fond des gorges et des vallées, avec une impétuosité et des mugissements épouvantables. A l'endroit où nous rencontrâmes le fleuve, il était encaissé entre deux montagnes, dont les flancs escarpés se dressant perpendiculairement sur ses bords, lui faisaient un lit étroit, mais d'une grande profondeur ; les eaux couraient rapidement, en faisant entendre un bruit sourd et lugubre. De temps en temps, on voyait avancer d'énormes quartiers de glace, qui, après avoir tournoyé dans mille remous, allaient se briser avec fracas contre les aspérités de la montagne.

Nous suivîmes la rive droite du Kin-Cha-Kiang pendant une demi-journée. Vers midi, nous arrivâmes à un petit village où nous trouvâmes disposé à l'avance, tout ce qui était nécessaire pour le passage du fleuve. La caravane se

  1. (1) Ce fleuve, vers sa source, porte le nom mongol de Mouroui oussou, fleuve tortueux. Dans son cours à travers la Chine, et à son embouchure, il porte le nom de Yang-Tze-Kiang, fleuve fils de la mer. Les Européens le nomment le Fleuve bleu.