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les habitants paraissent vivre dans l'aisance. On remarque parmi eux, outre les soldats du poste, un grand nombre de Chinois des provinces du Ssé-Tchouen et du Yun-Nan, qui tiennent quelques boutiques de commerce, et exercent les arts et les métiers de première nécessité. Peu d'années, dit-on, leur suffisent pour faire, dans ce pays, une assez jolie fortune. Les deux Mandarins militaires du Kiang-Tsa, qui avaient été compagnons d'armes de Ly-Kouo-Ngan, furent effrayés de l'état déplorable dans lequel ils le trouvèrent réduit, et lui conseillèrent fortement de continuer sa route en palanquin. Nous joignîmes nos instances aux leurs, et nous eûmes le bonheur de triompher de l'avarice du Pacificateur des royaumes. Il parut enfin comprendre qu'un mort n'avait pas besoin d'argent, et qu'avant tout, il fallait songer à conserver sa vie. Le fils du Mandarin Peï semblait être mort fort à propos, pour mettre à la disposition de Ly-Kouo-Ngan son palanquin et ses huit porteurs chinois ; le tout se trouvait à Kiang-Tsa. On s'arrêta un jour, pour faire quelques réparations au palanquin, et pour donner aux porteurs le temps de préparer leurs sandales de voyage.

Les contrées que nous rencontrâmes au sud de Kiang-Tsa, nous parurent moins froides et moins stériles que celles que nous avions parcourues précédemment. Le sol allait en s'inclinant d'une manière très-sensible ; nous étions bien encore constamment environnés de montagnes, mais elles perdaient peu à peu leur aspect triste et sauvage ; on ne voyait plus ces formes menaçantes, ces gigantesques masses de granit aux découpures brusques et perpendiculaires. Les grandes herbes et les forêts apparaissaient de