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revêtu d'une grande robe en taffetas jaune, et était chaussé de bottes thibétaines en velours rouge, et remarquables par la hauteur de leurs semelles. Son corps était de taille moyenne, et d'un bel embonpoint ; sa figure, fortement basanée, exprimait une bonhomie étonnante ; mais ses yeux, quand on les considérait attentivement, avaient quelque chose de hagard, une expression étrange qui nous effrayait. Enfin, il nous adressa la parole en langue mongole, dans laquelle il s'exprimait avec beaucoup de facilité. D'abord la conversation n'eut pour objet que les questions banales que s'adressent mutuellement des voyageurs, sur la route, la santé, le temps, le bon ou mauvais état des animaux. Quand nous vimes qu'il prolongeait sa visite, nous l'invitâmes à s'asseoir à côté de nous, sur le kang ; il hésita un instant, s'imaginant, sans doute, qu'en sa qualité de Bouddha-vivant, il ne lui conviendrait pas de se mettre au niveau de simples mortels comme nous. Cependant, comme il avait grande envie de causer un instant, il prit le parti de s'asseoir. Il ne pouvait, sans compromettre sa haute dignité, demeurer plus longtemps debout, pendant que nous étions assis.

Un Bréviaire que nous avions à côté de nous sur une petite table, fixa aussitôt son attention ; il nous demanda s'il lui était permis de l'examiner. Sur notre réponse affirmative, il le prit des deux mains, admira la reliure, la tranche dorée, puis l'ouvrit et le feuilleta assez longtemps ; il le referma, et le porta solennellement à son front, en nous disant : C'est votre livre de prières ; il faut toujours honorer et respecter les prières .... Il ajouta ensuite : Votre religion et la nôtre, sont comme cela. Et en disant