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soldats de la troupe ; son cheval ayant glissé sur le pont humide et tremblant, une de ses jambes de devant s'enfonça jusqu'au poitrail, entre les jointures de deux arbres, où il demeura pris comme dans un étau. Si le cavalier se fût trouvé dessus, il eût été infailliblement précipité au fond du torrent, et brisé sur les rochers. Après de longs et pénibles efforts, on finit par retirer ce pauvre animal de cette affreuse position. Au grand étonnement de tout le monde, il en sortit sans s'être cassé la jambe, sans même avoir reçu la moindre blessure.

Par delà ce misérable pont, nous reprîmes notre rude pèlerinage, à travers des montagnes escarpées et encombrées de neige. Pendant quatre jours, nous ne rencontrâmes dans ces contrées sauvages aucun village thibétain. Tous les soirs, nous couchions dans les corps-de-garde chinois, auprès desquels se groupaient quelques cabanes de bergers, construites avec des écorces d'arbres. Pendant ces quatre jours, nous changeâmes pourtant trois fois les oulah, sans éprouver le moindre retard. Les ordres avaient été si bien donnés d'avance, qu'à notre arrivée au poste nous trouvions déjà tout disposé pour notre départ du lendemain. Si nous n'avions su que, parmi ces contrées, désertes en apparence, il y avait cependant, dans les gorges des montagnes, de nombreux bergers vivant sous des tentes, il nous eût été impossible de nous expliquer cette prompte organisation des oulah. En général, ce n'a jamais été que dans les grands endroits, que le service de la caravane a éprouvé des retards et des difficultés.

Le quatrième jour depuis notre départ de Ghiamda, après avoir traversé sur la glace un grand lac, nous nous