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de la foi, et de la faire jouir à sa dernière heure du bienfait de la régénération baptismale ; puis, quand il lui aurait fermé les yeux, de retourner passer ses jours parmi les chrétiens (1)[1].

Pour dire vrai, Samdadchiemba n'était pas un jeune homme aimable ; son caractère âpre, sauvage, et quelquefois insolent, en faisait un assez mauvais compagnon de voyage. Cependant il y avait en lui un fonds de droiture et de dévouement, bien capable de compensera nos yeux les travers de son naturel. Nous éprouvâmes en nous séparant de lui une douleur profonde, et qui nous fut d'autant plus sensible, que nous n'eussions jamais soupçonné avoir au fond du cœur un si vif attachement pour ce jeune homme. Mais nous avions fait ensemble un voyage si long et si pénible, nous avions enduré ensemble tant de privations et supporté tant de misères, qu'insensiblement, et comme à notre insu, notre existence s'était, pour ainsi dire, soudée à la sienne. La loi d'affinité qui unit les hommes entre eux, agit au milieu des souffrances, bien plus puissamment que dans un état de prospérité.

Le jour fixé pour notre départ, deux soldats chinois vinrent, de grand matin, nous avertir que le Ta-Lao-Yé, Ly-Kouo-Ngan, c'est-à-dire, Son Excellence Ly, Pacificateur des royaumes, nous attendait pour déjeuner. Ce personnage était le Mandarin que l'ambassadeur Ki-Chan

  1. (1) Nous avons eu depuis peu de temps des nouvelles de Samdadchiemba. Après être resté pendant plus d'un an dans son pays, il est retourné dans nos missions de la Tartarie-Mongole et actuellement il est dans le village chrétien de Si-Wang, en dehors de la grande muraille (1852).