Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/357

Cette page n’a pas encore été corrigée

Le moment paraissait arrivé où les pèlerins tartares pourraient enfin venir s'instruire, à Lha-Ssa, de la seule doctrine qui puisse sauver les âmes et civiliser les nations.

Aussitôt que nous crûmes notre position assurée à Lha-Ssa, nous songeâmes aux moyens de renouer au plus tôt nos communications avec l'Europe. La voie du désert était impraticable. Nous avions bien pu traverser une fois, et comme miraculeusement, ces steppes infestées de brigands et de bêtes sauvages, mais il n'était pas permis de s'arrêter à la pensée d'organiser un service de courriers sur cette route affreuse. En supposant d'ailleurs toute la sécurité désirable, le trajet eût été d'une longueur à faire frémir. La voie de l'Inde nous parut la seule praticable. De Lha-Ssa jusqu'aux premiers postes anglais, il n'y a guère qu'un mois de marche. En établissant un correspondant par delà les monts Himalaya et un autre à Calcutta, nos communications avec la France devenaient, sinon promptes et faciles, du moins réalisables. Comme ce plan ne pouvait s'exécuter qu'avec l'assentiment du gouvernement thibétain, nous le communiquâmes au Régent, qui entra aussitôt dans nos vues. Il fut donc convenu qu'à la belle saison M. Gabet entreprendrait le voyage de Calcutta, avec une escorte thibétaine, qui l'accompagnerait jusqu'à Boutan.

Tels étaient les plans que nous formions pour l’établissement d'une mission à Lha-Ssa ; mais, en ce moment même, l'ennemi de tout bien travaillait à ruiner nos projets, et à nous éloigner d'un pays qu'il semble avoir choisi pour le siège de son empire. Ayant entendu ça et là quelques paroles de mauvais augure, nous comprimes que