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répandue dans la ville, et le peuple Tbibétain accourait de toutes parts pour nous faire fête. On nous saluait avec empressement, et le nom Français était dans toutes les bouches. Dès ce moment, les Azaras blancs furent complètement oubliés.

Aussitôt que nous eûmes regarni nos appartements, nous distribuâmes quelques tchang-ka, aux porteurs de nos effets, afin qu'ils pussent boire à notre santé un pot de petite bière thibétaine, et apprécier la magnanimité des Français qui ne font pas travailler le peuple gratis.

Tout le monde étant parti, nous rentrâmes dans notre solitude accoutumée, et la solitude amenant la réflexion, nous nous avisâmes de deux choses très-importantes : la première, que nous n'avions pas encore dîné, et la seconde, que nos deux coursiers n'étaient plus à leur râtelier. Pendant que nous songions aux moyens de faire promptement notre cuisine, et de découvrir ce qu'étaient devenus nos chevaux, nous vîmes apparaître au seuil de notre porte le gouverneur des Katchi qui nous tira de ce double embarras. Cet excellent homme ayant prévu que notre séance à la cour d'assises ne nous avait pas permis de faire bouillir notre marmite, arrivait suivi de deux domestiques portant une corbeille remplie de provisions. C'était un festin d'ovation qu'il nous avait préparé. — Et nos chevaux, pourrais-tu nous en donner des nouvelles ? nous ne les voyons plus dans la cour. — J'allais vous en parler ; ils sont depuis hier soir dans les écuries du Régent. Pendant votre absence, ils n'ont enduré ni la faim ni la soif. J'ai ouï dire que vous étiez dans l'intention de les vendre ;.... la chose est-elle vraie ? — O oui, c'est vrai, ces animaux nous ruinent ;