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leur colère. L'ambassadeur, prévenu à temps de leur arrivée, avait couru se cacher chez un Kalon, et les gens de sa suite s'étaient dispersés dans la ville. La multitude des Lamas se divisa alors en plusieurs troupes ; les uns se portèrent au palais du Nomekhan, et les autres envahirent la demeure des Kalons, demandant à grands cris qu'on leur livrât l'ambassadeur chinois. Il y eut, sur ce point, une lutte longue et acharnée, dans laquelle un des quatre ministres thibétains fut mis en lambeaux ; les autres reçurent des blessures plus ou moins dangereuses.

Pendant qu'on se battait chez les Kalons pour s'emparer de la personne de Ki-Chan, la troupe la plus nombreuse des Lamas avait enfoncé les portes de la prison où élait enfermé le Nomekhan, et voulait le porter en triomphe jusqu'à la lamaserie de Sera. Le Nomekhan s'opposa vivement à ce projet, et usa de toute son influence pour calmer l'exaltation des Lamas .... Il leur dit que leur révolte inconsidérée aggravait sa position au lieu de l'améliorer. — Je suis, leur dit-il, victime d'une conspiration ; j'irai à Péking, j'éclairerai l'Empereur, et je reviendrai triomphant au milieu de vous. Maintenant, nous n'avons qu'à obéir au décret impérial .... Je partirai selon ce qu'il m'a été ordonné .... Vous autres, rentrez on paix dans votre lamaserie. — Ces paroles ne changèrent pas la résolution des Lamas ; mais la nuit venant à tomber, ils reprirent tumultuairement le chemin de Sera, se promettant bien de mieux organiser leur plan pour le lendemain.

Quand le jour parut, les Lamas commencèrent à s'agiter dans leur immense couvent, et se préparèrent à envahir de nouveau la ville de Lha-Ssa ; mais, à leur grand étonnement,