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pas absorbés par ses hautes fonctions de Bouddha-vivant, il les utilise en se familiarisant à son futur métier de généralissime des Kélans. On prétend qu'il lance très-bien une flèche, et qu'il se sert avec habileté de la lance et du fusil à mèche. Il nourrit de grands troupeaux de chevaux pour sa future cavalerie, et des meutes de chiens énormes, qui, joignant une force prodigieuse à une intelligence supérieure, devront jouer un rôle important dans la grande armée des Kélans.

Ces idées folles et extravagantes ont tellement pénétré dans les masses, et surtout dans l'esprit de ceux qui se sont enrôlés dans la confrérie des Kélans, qu'elles pourraient fort bien, un jour, occasionner une révolution dans le Thibet. Ce n'est jamais vainement que les peuples se préoccupent ainsi de l'avenir. Après la mort du grand Lama de Djachi-Loumbo, un aventurier audacieux n'aura qu'à se rendre dans le Thien-Chan-Pé-Lou, puis se proclamer hardiment Bandchan-Remboutchi, et faire un appel aux Kélans ... ; il n'en faudra peut-être pas davantage pour soulever ces populations fanatiques.

Un résultat actuel et immédiat de cette confrérie des Kélans, c'est de donner aux Bandchan-Remboutchi une importance qui parait porter peu à peu atteinte à la suprématie du Talé-Lama. Ce résultat est d'autant plus facile à obtenir, que le souverain de Lha-Ssa est un enfant de neuf ans, et que ses trois prédécesseurs ont expiré de mort violente avant d'atteindre leur majorité, fixée par les lois à vingt ans. Le Bandchan-Remboutchi, qui paraît être un homme habile et ambitieux, n'aura pas manqué, sans doute, d'utiliser cette période de quatre minorités, et de