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les lamaseries, tout le monde dit que ce sont des impies. Cependant, comme, en général, ils sont riches et puissants, on se range dans les rues pour les laisser passer, et chacun leur tire la langue en signe de respect. Dans le Thibet, quand on veut saluer quelqu'un, on se découvre la tête, on tire la langue, et on se gratte l'oreille droite ; ces trois opérations se font en même temps.

Les Chinois qu'on voit à Lha-Ssa, sont pour la plupart soldats ou employés dans les tribunaux ; ceux qui demeurent fixés dans cette ville, sont en très-petit nombre. A toutes les époques, les Chinois et les Thibétains ont eu ensemble des relations plus ou moins importantes ; souvent ils se sont fait la guerre, et ont cherché à empiéter sur les droits les uns des autres. La dynastie tartare-mantchoue, comme nous l'avons déjà remarqué ailleurs, a compris, dès le commencement de son élévation, combien il lui était important de se ménager l'amitié du Talé-Lama, dont l'influence est toute-puissante sur les tribus mongoles. En conséquence, elle n'a jamais manqué d'avoir à la cour de Lha Ssa, deux grands Mandarins revêtus du titre de Kin-Tchaï, c'est-à-dire, ambassadeur ou délégué extraordinaire. Ces personnages ont pour mission avouée de présenter, dans certaines circonstances déterminées, les hommages de l'empereur chinois au Talé-Lama, et de lui prêter l'appui de la Chine dans les difficultés qu'il pourrait avoir avec ses voisins. Tel est, en apparence, le but de cette ambassade permanente ; mais, au fond, elle n'est là que pour flatter les croyances religieuses des Mongols, et les rallier à la dynastie régnante, en leur faisant croire que le gouvernement de Péking a une grande dévotion pour la