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obligés de nous mettre à la ration de deux écuellées de tsamba par jour. Avant de partir, nous avions assez bien fait nos calculs ; mais nous n'avions pas compté sur le gaspillage que nos deux chameliers feraient de nos provisions ; le premier, par bêtise et insouciance, et le second, par méchanceté. Heureusement que nous étions sur le point d'arriver à une grande station thibétaine, où nous devions trouver les moyens de nous approvisionner.

Après avoir suivi pendant quelques jours une longue série de vallons, où l'on découvrait parfois quelques tentes noires et de grands troupeaux d'yaks, nous allâmes enfin camper à côté d'un grand village thibétain. Il est situé sur les bords de la rivière Na-Ptchu, désignée sur la carte de M. Andriveau-Goujon, par le nom mongol de Khara-Oussou ; les deux dénominations signifient également : Eaux-Noires. Na-Ptchu est la première station thibétaine de quelque importance, que l'on rencontre en allant à Lha-Ssa. Le village est composé de maisons bâties en terre, et d'une foule de tentes noires. Les habitants ne cultivent pas la terre. Quoiqu'ils demeurent toujours à poste fixe, ils sont bergers comme les tribus nomades, et ne s'occupent que du soin d'élever des troupeaux. On nous raconta, qu'à une époque très-reculée, un roi du Koukou-Noor, ayant fait la guerre aux Thibétains, les subjugua en grande partie, et donna le pays de Na-Ptchu aux soldats qu'il avait emmenés avec lui. Quoique ces Tartares soient actuellement fondus dans les peuples thibétains, on peut encore remarquer, parmi les tentes noires, un certain nombre de ïourtes mongoles. Cet événement peut aussi expliquer l'origine d'une foule d'expressions mongoles, qui sont en