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de distance l'un de l'autre. L'endroit ou nous franchîmes le Bayen-Kharat n'est pas très-éloigné des sources du fleuve Jaune ; nous les avions à notre gauche, et il nous eût fallu tout au plus deux journées de marche pour aller les visiter. Mais ce n'était nullement la saison des parties de plaisir. Nous étions loin de songer à une excursion de touriste aux sources du fleuve Jaune ; pour le moment, le passage du Bayen-Karat avait de quoi nous préoccuper suffisamment.

Du pied jusqu'à la cime, la montagne était complètement enveloppée d'une épaisse couche de neige. Avant d'en entreprendre l'ascension, les principaux membres de l'ambassade tinrent conseil. On délibérait, non pas pour savoir si on franchirait ou non la montagne ; puisqu'on voulait arriver à Lha-Ssa, il fallait absolument passer par là. Il n'était pas non plus question de savoir si on attendrait ou non la fonte des neiges ; mais on débattait les avantages qu'il y aurait d'effectuer l'ascension le jour même, ou d'attendre au lendemain. La crainte des avalanches dominait tous les esprits, et l'on eût voulu avoir une assurance contre le vent. — A l'exemple de tous les conseils du monde, le conseil de l'ambassade thibétaine fut bientôt divisé en deux partis. Les uns dirent qu'il fallait partir le jour même, les autres soutinrent qu'il serait mieux d'attendre au lendemain. Pour se tirer d'embarras, on eut recours aux Lamas qui avaient quelque réputation de savoir deviner. Mais cet expédient ne réussit pas à ramener les esprits à l'unité. Parmi les devins, il y en eut qui prétendirent que la journée serait calme, et que le lendemain on aurait un vent épouvantable ; il