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rations, on envoya à la découverte un Lama plein d'adresse et de courage. Il parcourut toutes les contrées situées à l'est du royaume d' Oui ; il visita toutes les tribus tartares, s'arrêtant partout où il entendait parler de quelque homme renommé pour son savoir et sa sainteté. Toutes ses recherches furent inutiles ; il eut beau interroger, beau parler de la vallée du royaume d'Oui, et du temple qu'on avait essayé d'y élever, il ne fut compris de personne. Il s'en retournait donc triste et découragé, lorsqu'en traversant les grandes plaines qui séparent le Thibet de la Chine, la sous-ventrière de sa selle venant à casser, il tomba de cheval. Ayant aperçu non loin de là, sur les bords d'un petit étang, une tente pauvre et délabrée, il s'y rendit pour réparer sa selle. Après avoir attaché son cheval à un pieu fixé à la porte de la tente, il entra et trouva un vénérable vieillard absorbé dans la prière. — Frère, dit le voyageur, que la paix soit toujours dans ta demeure ! — Frère, répondit le vieillard, sans faire le moindre mouvement, assieds-toi auprès de mon foyer .... Le Lama thibétain crut s'apercevoir que le vieillard était aveugle. — Je vois avec douleur, lui dit-il, que tu es privé de l'usage de tes yeux. — Oui, il y a un grand nombre d'années que j'ai perdu le bonheur de contempler le soleil et la verdure de nos belles prairies, mais la prière est un grand soulagement à mon infortune ... Frère, il me semble que ton langage a un accent particulier, n'es-tu pas un homme de nos tribus ? — Je suis un pauvre Lama de l'orient. J'ai fait vœu de visiter les temples qu'on a élevés dans les contrées mongoles, et de me prosterner devant les saints personnages que je rencontrerais sur ma route,