Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/164

Cette page n’a pas encore été corrigée

ou de celui des Poba ? — Nous ne sommes ni de l'un ni de l'autre ; nous sommes du royaume des Français. — Ah oui ! vous êtes des Framba ? Je n'en avais jamais encore entendu parler. Il est si grand, cet occident ! les royaumes y sont si nombreux ! Mais au fond, cela n'y fait rien ; nous sommes toujours de la même famille, n'est-ce pas ? — Oui, certainement, tous les hommes sont frères, quel que soit leur royaume. C'est vrai, ce que vous dites est fondé en raison, tous les hommes sont frères. Cependant on sait que sous le ciel, il existe trois grandes familles ; nous autres hommes de l'occident, nous sommes tous de la grande famille thibétaine : voilà ce que j'ai voulu dire. — Aka, sais-tu d'où viennent ces trois grandes familles qui sont sous le ciel ? — Voici ce que j'ai entendu dire aux Lamas instruits des choses de l'antiquité ... Au commencement il n'y avait sur la terre qu'un seul homme ; il n'avait ni maison ni tente : car, en ce temps-là, l'hiver n'était pas froid, et l'été n'était pas chaud ; le vent ne soufflait pas avec violence, il ne tombait ni de la pluie ni de la neige ; le thé croissait de lui-même sur les montagnes, et les troupeaux n'avaient pas à craindre les animaux malfaisants. Cet homme eut trois enfants, qui vécurent longtemps avec lui, se nourrissant de laitage et de fruits. Après être parvenu à une très-grande vieillesse, cet homme mourut. Les trois enfants délibérèrent pour savoir ce qu'ils feraient du corps de leur père ; ils ne purent s'accorder, car ils avaient chacun une opinion différente. L'un voulait l'enfermer dans un cercueil et le mettre en terre, l'autre voulait le brûler, le troisième disait qu'il fallait l'exposer sur le sommet d'une montagne. Ils résolurent donc de diviser en trois le