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Descartes et l'autre Lamennais, ont beaucoup disputé pour savoir si le paganisme est un crime ou une erreur ; il nous semble qu'on pourrait dire qu'il n'est ni l'un ni l'autre, mais simplement l'effet de l'ignorance. L'esprit d'un païen est enveloppé de ténèbres ; il suffit d'y porter la lumière pour que le jour s'y fasse, il n'a besoin ni d'une thèse selon les cartésiens, ni d'un réquisitoire selon les lamennaisiens : ce qu'il lui faut, c'est un enseignement.

Cet empressement des Lamas à venir nous visiter, surtout leurs bonnes dispositions pour le christianisme, finirent par donner de la jalousie et de l'ombrage à Sandara ; il prit un caractère intraitable ; il se bornait à nous donner sèchement et laconiquement sa leçon de thibétain, puis il se renfermait pendant le reste de la journée dans un silence plein de morgue et d'insolence. S'il nous arrivait de lui demander humblement le nom thibétain d'un objet, ou un éclaircissement sur quelque phrase des dialogues, il ne daignait pas même répondre à notre question : Dans cette extrémité, nous avions ordinairement recours à notre voisin, le jeune étudiant en médecine, qui nous obligeait toujours avec empressement et cordialité. Quoiqu'il ne fût pas très-savant en thibétain, il pouvait pourtant nous être d'une grande utilité. Son naturel, plein de simplicité et de franchise, nous permettait d'ailleurs de lui adresser une foule de questions sur certaines pratiques des Lamas. En retour de ces services, nous secondions de tout notre cœur son désir de s'instruire de la religion chrétienne. Bien différent de Sandara, il était plein de respect pour les vérités que nous lui annoncions ; mais son caractère timide et irrésolu l'empêchait de renoncer franchement au bouddhisme. Il avait