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comme le doigt. Nous cherchâmes à les arracher de notre chair ; mais cela nous fut impossible. Comme nous ne ressentions aucune douleur, nous attendîmes. Bientôt, ces bêtes se gonflèrent et devinrent toutes rondes ; alors, elles tombèrent d'elles-mêmes ... Oh ! allez, ce Thibet est un singulier pays. On y voit des animaux qu'on ne trouve nulle part ailleurs. Les Lamas qui n'ont pas fait ce voyage, ne veulent pas croire ce qu'on en raconte. — Ils ont tort, répondîmes-nous, ce que tu viens de dire est en tout point conforme à la vérité ; ces animaux, si curieux, ne se trouvent pas exclusivement dans le Thibet ; dans notre pays ils sont très-communs. Ceux qui sont enveloppés de dards se nomment, dans notre langue, hérissons ; les gros vers gris s'appellent sangsues. — Comment ! vous avez vu des animaux de ce genre ? — Souvent. — Ah ! tant mieux ; il y a des Lamas qui n'y croient pas, vous pourrez leur en parler.

« .... Notre route alla toujours bien jusqu'à la mauvaise montagne. Cette montagne est très-élevée, et couverte d'une grande forêt de pins et de houx ; nous nous étions reposés au bas, pendant toute une journée, dans une tente noire. Quand la nuit fut venue, deux d'entre nous dirent : Le ciel est pur, la lune est belle ; nous ferons bien de traverser la mauvaise montagne avec la fraîcheur de la nuit. Demain le temps sera chaud ; il nous serait plus pénible de grimper. — Non, dirent les autres, la nuit est pour les bêtes sauvages. Les hommes ne doivent voyager que de jour... Ainsi, nous n'étions pas d'accord. Les premiers insistèrent ; ils s'armèrent de leur bâton ferré, chargèrent le bagage sur leurs épaules, et se mirent en route.