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pouvions avancer qu’avec beaucoup de peine et de fatigue. Au milieu de ces sablières, nous étions écrasés par une chaleur étouffante, Nos bêtes de charge étaient fumantes de sueur, et nous-mêmes nous étions dévorés par une soif ardente ; mais c’était en vain que nous cherchions autour de nous quelques gouttes d’eau pour nous rafraîchir.

Il était déjà tard, et nous commencions à craindre de ne pouvoir rencontrer un endroit propice pour dresser notre tente. Le terrain se raffermit pourtant peu à peu, et nous pûmes découvrir enfin quelques traces de végétation. Bientôt les sables diminuèrent, et le sol devint de plus en plus beau et verdoyant. Nous aperçûmes sur notre gauche, et non loin de nous, l’ouverture d’une gorge. M. Gabet pressa sa chamelle, et courut au galop examiner ce poste. Il reparut bientôt sur le sommet d’une colline, il poussa un grand cri, et nous fit signe de la main. Nous nous dirigeâmes vers lui ; car la Providence lui avait fait rencontrer un assez bon gîte. Un petit étang dont les eaux étaient à moitié cachées par des joncs épais et des plantes marécageuses, quelques broussailles disséminées çà et là sur les coteaux, c’était tout ce qu’il nous fallait. Altérés, affamés, fatigués comme nous l’étions, nous ne pouvions ambitionner rien de mieux.

A peine les chameaux furent-ils accroupis, que chacun de nous, spontanément et sans délibérer, n’eut rien de plus pressé que de prendre sa petite écuelle de bois, et d’aller puiser quelques gorgées d’eau entre les joncs du marais ; l’eau était assez fraîche, mais elle saisissait violemment le nez par une forte odeur hydrosulfurique. Je me ressouvins d’en avoir bu de semblable aux Pyrénées, dans