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son cheval en avant, et hissait l'outre jusqu'au bord du puits ; un autre homme recevait l'eau, et la vidait à mesure dans les auges.

Le puits était d'une profondeur effrayante ; la corde dont on se servait pour faire monter l'outre, nous parut avoir plus de deux cents pieds de longueur. Au lieu de couler sur une poulie, elle était tout bonnement appuyée sur une grosse pierre, où le frottement avait fini par creuser une large rainure. Quoique le puisage se fit avec une grande activité, il était presque nuit lorsque tous les troupeaux furent suffisamment abreuvés ; alors nous allâmes chercher nos cinq animaux pour leur donner part au banquet commun. Les Tartares eurent la complaisance de nous puiser de l'eau ; il est probable que, sans leur secours, nous n'aurions jamais pu y parvenir, et que nous aurions été obligés d'endurer la soif à côté d'un puits très-abondant.

Ces Tartares ne nous parurent pas contents, comme ceux que nous avions rencontrés dans les autres parties de la Mongolie ; on voyait qu'ils souffraient beaucoup d'être obligés de passer leur vie dans un pays si ingrat, où les pâturages étaient si rares et l'ean encore davantage ; ils nous parlaient des royaumes mongols que nous avions déjà parcourus, et où il était si facile, même si agréable de nourrir des animaux. — O que les habitants de ces contrées sont heureux ! disaient-ils ; combien notre bonheur serait grand, si nous pouvions aller passer nos jours au milieu de ces gras pâturages !

Avant de s'en retourner vers leur habitation, qui était située derrière une haute montagne, ces Tartares nous dirent que le lendemain il nous faudrait partir avant le jour ;