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Outre les pèlerins dont la dévotion s'exerce dans l'intérieur ou aux environs des lamaseries, on en rencontre quelquefois qui ont entrepris des voyages d'une longueur effrayante, et qu'ils doivent exécuter en se prosternant à chaque pas. Il est bien triste et bien lamentable, de voir ces malheureuses victimes de l'erreur endurer à pure perte des peines indicibles ; ou se sent le cœur navré de douleur, et on ne peut s'empêcher d'appeler de tous ses vœux le moment, où ces pauvres Tartares consacreront au service du vrai Dieu cette énergie religieuse, qu'ils dépensent et gaspillent tous les jours au sein d'une religion vaine et menteuse. Nous avions espéré pouvoir profiter de la solennité de Rache-Tchurin pour annoncer la vraie foi au peuple des Ortous ; mais telle n'était pas sans doute la volonté de Dieu, puisqu'il permit que nous nous égarassions le jour même qui paraissait le plus favorable à nos projet. Nous traversâmes donc la lamaserie de Rache-Tchurin sans nous y arrêter. Nous avions hâte d'arriver à la source de cette immense superstition, dont nous n'apercevions autour de nous que quelques maigres courants.

A peu de distance de la lamaserie de Rache-Tehurin, nous rencontrâmes une grande route très-bien tracée, et fréquentée par un grand nombre de voyageurs. Ce n'était pas la dévotion qui les mettait en mouvement, comme ceux que nous avions trouvés en deçà de la lamaserie ; ils étaient mus au contraire par l'intérêt, et se dirigeaient vers le Dabsoun-Noor, un lac du sel, saline célèbre dans tout l'occident de la Mongolie, et qui fournit du sel non-seulement aux Tartares voisins ; mais encore à plusieurs provinces de l'empire chinois.