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fruits de ce genre de dévotion. Lorsque les lamaseries sont d'une grande étendue, une journée entière suffit à peine pour en faire le tour, en se prosternant à chaque pas comme l'exige la règle. Les pèlerins qui ont du goût pour cet exercice, sont obligés de se mettre en route aussitôt que le jour paraît, et souvent ils ne sont de retour qu'à la nuit tombante. On ne peut exécuter ce rude pèlerinage à plusieurs reprises ; il n'est pas même permis de s'arrêter un instant pour prendre un peu de nourriture. Quand on l'a commencé, si on ne le termine pas du même coup, cela ne compte pas ; on n'a acquis aucun mérite, et par conséquent, on n'a à attendre aucun avantage.

Les prostrations doivent être parfaites, de manière que le corps soit étendu tout de son long, et que le front touche la terre. Les bras doivent être allongés en avant, et les mains jointes. Avant de se relever, le pèlerin décrit une circonférence avec deux cornes de bouc qu'il tient dans ses mains, et en ramenant les bras le long de son corps. On ne peut s'empêcher d'être touché d'une grande compassion, en voyant ces malheureux, le visage et les habits tout couverts de poussière, et quelquefois de boue. Le temps le plus affreux n'est pas capable d'arrêter leur courageuse dévotion ; ils continuent leurs prostrations au milieu de la pluie et de la neige, et par le froid le plus terrible.

Il existe plusieurs manières de faire le pèlerinage autour des lamaseries. Il en est qui ne se prosternent pas du tout. Ils s'en vont, le dos chargé d'énormes ballots de livres, qui leur ont été imposés par quelque grand Lama. Quelquefois,