Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 1.djvu/337

Cette page n’a pas encore été corrigée

son caractère, et de l'avoir dans la suite moins traitable et plus difficile. Nous nous mîmes donc en œuvre, et nous essayâmes de faire à nous deux toute la besogne.

Déjà nous avions plié la tente et chargé un chameau ; tout cela s'était fait en silence. Samdadchiemba était toujours assis sur sa pierre, cachant sa figure dans ses mains, ou plutôt regardant peut-être entre ses doigts, comment nous nous tirions du travail qu'il était accoutumé de faire. Quand il vit que les choses allaient leur train ordinaire, il se leva sans rien dire, chargea l'autre chameau, puis sella son mulet, monta dessus, et se mit en route comme il était habitué à faire tous les jours. Nous nous contentâmes de sourire entre nous ; mais nous eûmes bien garde de lui rien dire, de peur d'irriter davantage un caractère qui devait être traité avec prudence et ménagement.

Nous nous arrêtâmes dans un poste voisin de la route ; il n'était pas magnifique, mais il valait beaucoup mieux que le ravin de désolation où nous avions éprouvé tant de misères. Au moins nous étions tous réunis ; jouissance immense dans un désert, et que nous n'aurions jamais justement appréciée, si nous n'avions pas eu la douleur de nous trouver séparés. Nous célébrâmes cette réunion par un banquet splendide ; la farine de froment et les foies de moutons furent mis à contribution. Ce luxe culinaire dérida le front sourcilleux de Samdadchiemba ; il se mit en besogne avec enthousiasme, et nous fit un souper à plusieurs services.

Le lendemain, dès que le jour parut, nous nous mimes en route ; et bientôt nous vîmes se dessiner au loin, sur le fond jaunâtre d'une montagne sablonneuse, quelques grands é