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Samdadchiemba, lui dîmes-nous, écoute avec attention, nous avons à te dire une parole importante. Quoique dans ta jeunesse tu aies beaucoup voyagé en Mongolie, il ne s'ensuit pas que tu saches très-bien les routes ; tu dois te défier de tes conjectures, et consulter un peu plus les Tartares que nous rencontrons. Si hier, par exemple, tu avais demandé la route, si tu ne t'étais pas obstiné, selon ton habitude, à te guider sur le cours du soleil, nous n'aurions pas enduré tant de misères. — Samdadchiemba ne répondit pas un mot.

Nous nous levâmes aussitôt pour faire les préparatifs du départ. Quand nous eûmes mis en ordre les objets qui étaient entassés pêle-mêle dans l'intérieur de la tente, nous remarquâmes que le Dchiahour n'était pas occupé, comme à l'ordinaire, du soin de seller les chameaux. Nous allâmes voir ce qu'il faisait, et nous fûmes fort surpris de le voir tranquillement assis sur une grosse pierre, derrière la tente. — Hé bien, lui dîmes-nous, est-ce qu'il n'a pas été réglé que ce soir nous irions camper ailleurs ? Que fais-tu là assis sur cette pierre ? — Samdadchiemba ne répondit pas ; il ne releva pas même ses yeux qu'il tenait constamment fixés en terre. — Samdadchiemba, qu'as-tu donc, que tu ne selles pas les chameaux ? — Puisque vous voulez partir, répondit-il sèchement, suivez votre volonté ; pour moi, je ne pars pas : je ne puis plus vous accompagner. Je suis un homme mauvais et sans conscience ; quel besoin avez-vous de moi ?... Nous fûmes bien surpris d'entendre de semblables paroles, de la bouche d'un jeune néophyte qui paraissait nous être attaché. Nous ne voulûmes pas l'engager à nous accompagner, de peur d'aiguiser la fierté naturelle de