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fait des reproches de ce que nous avions permis à des étrangers de cultiver nos terres, nous nous prosternâmes en gardant un profond silence. Cependant notre roi, qui agit toujours avec justice, fit écrire l'ordonnance à laquelle il apposa le sceau rouge. L'ordonnance disait que le Roi ne permettant plus aux Kitas de demeurer dans le pays, ils devaient l'abandonner avant le premier jour de la huitième lune. Trois Taitsi montèrent à cheval, et allèrent présenter l'ordonnance aux Kitas. Ceux-ci ne répondirent rien aux trois députés ; ils se contentèrent de se dire entre eux : Le Roi veut que nous partions, c'est bien ...

Plus tard, nous sûmes qu'ils s'étaient réunis, et qu'ils avaient résolu de désobéir aux ordres du Roi et de rester malgré lui dans le pays. Le premier jour de la huitième lune arriva, et ils occupaient encore paisiblement leurs habitations, sans faire aucun préparatif de départ. Le lendemain, avant le jour, tous les Tartares montèrent à cheval, s'armèrent de leurs lances, et poussèrent tous les troupeaux parmi les terres cultivées par les Kitas. La moisson était encore sur pied ; quand le soleil parut, il n'en restait plus rien. Tout avait été dévoré par les animaux, ou broyés sous leurs pas. Les Kitas poussèrent des cris, et maudirent les Mongols ; mais tout était fini. Voyant que leur affaire était désespérée, ils rassemblèrent le jour même leurs meubles et leurs instruments aratoires, et s'en allèrent se fixer dans la partie orientale des Ortous, à quelque distance du fleuve Jaune, tout près du Paga-Gol. Puisque vous êtes venus par Tchagan-Kouren, vous avez dû rencontrer sur votre route, à l'occident du Paga-Gol, des Kitas qui cultivent quelques coins de terre ; hé bien, ce sont eux qui habitaient