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devoir, et le silence de son maître est le seul éloge qu'il ait droit d'obtenir ; si, au contraire, il ne rend pas compte de sa leçon d'une manière convenable, les punitions les plus sévères lui font sentir sa faute. Il arrive souvent, dans ces circonstances, que le maître, sortant de sa gravité accoutumée, s'élance sur son disciple et l'accable de coups, en même temps qu'il profère contre lui les malédictions les plus terribles. Les disciples qui se trouvent trop maltraités prennent quelquefois la fuite, et s'en vont chercher des aventures loin de leur lamaserie ; mais en général ils subissent patiemment les punitions qu'on leur inflige, même celle de passer la nuit à la belle étoile, dépouillés de leurs habits, et pendant l'hiver. Souvent nous avons eu occasion de causer avec des chabis ; et comme nous leur demandions s'il n'y aurait pas moyen d'apprendre les prières sans être battus, ils nous répondaient ingénument et avec un accent qui témoignait de leur conviction, que cela était impossible. — Les prières que 'lon sait le mieux, disaient-ils, sont celles pour lesquelles on a reçu le plus de coups. Les Lamas qui ne savent pas prier, qui ne savent pas connaître et guérir les maladies, tirer les sorts et prédire l'avenir, sont ceux qui n'ont pas été bien battus par leurs maîtres.

En dehors de ces études, qui se font à domicile, et sous la surveillance immédiate du maître, les chabis peuvent assister, dans la lamaserie, à des cours publics, où l'on explique les livres qui ont rapport à la doctrine et à la médecine. Mais ces explications sont le plus souvent vagues, insuffisantes, et incapables de former des Lamas instruits ; il en est peu qui puissent se rendre un compte exact des livres qu'ils étudient ; pour justifier leur négligence à cet égard,