Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 1.djvu/293

Cette page n’a pas encore été corrigée

de vies successives ; c'est tout bonnement une palingénésie. Pendant que le saint reste engourdi dans sa chrysalide, ses disciples sont dans la plus grande anxiété ; car leur grande affaire, c'est de découvrir l'endroit où leur maître ira se transformer et reprendre sa vie. Si l'arc-en-ciel vient à paraître dans les airs, ils le regardent comme un signe que leur envoie leur ancien grand Lama, afin de les aider dans leurs recherches : tout le monde se met alors en prières, et pendant que la lamaserie veuve de son Bouddha redouble ses jeûnes et ses oraisons, une troupe d'élite se met en route pour aller consulter le Tchurtchun, ou devin fameux dans la connaissance des choses cachées au commun des hommes. On lui raconte que tel jour de telle lune, l'arc-en-ciel du Chaberon s'est manifesté dans les airs. Il a fait son apparition sur tel point ; il était plus ou moins lumineux, et a été visible pendant tant de temps. Puis il a disparu, en s'effaçant avec telle et telle circonstance. Quand le Tchurtchun a obtenu tous les renseignements nécessaires, il récite quelques prières, ouvre ses livres de divination, et prononce enfin son oracle, pendant que les Tartares qui sont venus le consulter écoutent ses paroles à genoux, et dans le plus profond recueillement. — Votre grand Lama, leur dit-il, est revenu à la vie dans le Thibet, à tant de distance de votre lamaserie. Vous le trouverez dans telle famille. — Quand ces pauvres Mongols ont ouï cet oracle, ils s'en retournent pleins de joie, annoncer à la lamaserie l'heureuse nouvelle.

Il arrive souvent que les disciples du défunt n'ont pas besoin de se tourmenter, pour découvrir le berceau de leur