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ce droit est inamissible, et c'est un crime de prétendre l'en déposséder.

Il y a peu d'années, le roi de Barains (1)[1] fut accusé à Péking de machiner une révolte contre l'Empereur ; il fut jugé par les tribunaux suprêmes, sans être entendu, et condamné à être raccourci par les deux bouts. L'esprit de la loi voulait qu'on lui coupât les pieds et la tête. Le roi fit donner des sommes énormes à ceux qui devaient veiller à l'exécution de l'édit impérial, et on se contenta de lui couper sa tresse de cheveux, etde lui arracher la semelle de ses bottes. On écrivit à Péking, que l'ordre avait été exécuté, et la chose en resta là. Le roi pourtant cessa de régner, et son fils monta sur le trône.

Quoique, d'après une espèce de droit coutumier, le pouvoir doive toujours rester dans la même famille, on ne peut pas dire toutefois qu'il y ait quelque chose de bien fixe à cet égard. Rien de plus vague et de plus indéterminé, que les rapports qui existent entre les souverains lar- tares et le Grand-Khan ou empereur de la Chine, dont la volonté toute-puissante est au-dessus de toutes les lois et de tous les usages. Dans la pratique, l'Empereur a le droit de faire tout ce qu'il fait, et ce droit ne lui est contesté par personne. Si des cas douteux et contestés viennent à surgir, la force en décide.

En Tartarie, toutes les familles qui ont quelque lien de parenté avec le souverain, constituent une noblesse, ou caste patricienne, à qui appartient le sol tout entier. Ces nobles, qu'on nomme Taitsi, sont distingués par un globule

  1. (1) Barrains est une principauté située au nord de Péking, et l'une des plus célèbres de la Tartarie mongole.