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mais il avait de l'eau jusqu'aux épaules. Samdadchiemba, en voyant tout ce désordre, écumait de colère ; enfin il n'y tint plus, il se dépouilla adroitement de tous ses habits, sans descendre du chameau, les jeta dans la barque, et se laissa glisser le long de sa monture. — Reprends cet homme dans ta barque, dit-il au pêcheur, je n'en veux plus ; je vais retourner à terre, et chercher quelqu'un qui sache la route ... En disant ces mots, il s'éloigna de nous, marchant dans les eaux qui parfois lui montaient jusqu'au cou, et traînant après lui les animaux, qui, voyant le Dchiahour ouvrir la marche, avançaient avec plus de confiance.

Notre cœur était plein d'émotion en voyant le dévouement et le courage de ce jeune néophyte, qui pour nos intérêts n'avait pas fait difficulté de se jeter à l'eau, dans une saison où le froid était déjà assez rigoureux. Nous le suivîmes des yeux avec anxiété, jusqu'au moment où nous vîmes qu'il avait presque regagné la terre.... Maintenant, nous dit le batelier, vous pouvez être tranquilles ; il trouvera dans notre cabane un homme qui saura le conduire et lui faire éviter les endroits dangereux.

Nous continuâmes notre route, mais la navigation cessa bientôt d'aller bien ; le batelier ne sut pas retrouver le bon chemin que nous avions suivi tout d'abord, et que nous avions quitté pour aller au secours de la caravane ; engagée parmi les herbes aquatiques, la barque ne put que difficilement avancer. Nous avions beau tourner à droite et à gauche, revenir quelquefois sur nos pas, le chemin était partout impraticable ; les eaux étaient si basses, que la barque n'avançait plus qu'en labourant péniblement la vase Nous fûmes contraints d'aider à la manœuvre ; le batelier se