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avant de les vider. Est-ce que ce n'est pas un péché, de tuer ce qui est vivant ! — Va faire ton pain, et laisse nous en repos. Toujours donc tes idées de métempsycose ? Est-ce que tu crois encore que les hommes se transforment en bêtes, et les bêtes en hommes ?... Les lèvres de notre Dchiahour nous dessinèrent un long rire ... Ho-lé, ho-lé, dit-il, en se frappant le front, que j'ai la tête dure ! je n'y pensais plus ; j'avais oublié la doctrine ... Et il s'en retourna un peu confus d'être venu nous donner un avis si ridicule. Les poissons furent frits dans de la graisse de mouton, et nous les trouvâmes d'un goût exquis.

En Tartarie, et dans le nord de la Chine, la pêche ne dure que jusqu'au commencement de l'hiver, époque où les étangs et les rivières se glacent. Alors on expose à l'air, pendant la nuit, les poissons qu'on conservait tout vivants dans des réservoirs. Ils gèlent aussitôt et peuvent être encaissés sans inconvénient. C'est ainsi qu'on les livre au commerce. Durant les longs hivers du nord de l'empire, les riches Chinois peuvent toujours, par ce moyen, se procurer du poisson frais ; mais il faut bien se garder d'en faire des provisions trop fortes, et dont on ne puisse venir à bout durant la saison des grands froids ; car au premier dégel le poisson entre en putréfaction.

Durant nos quelques jours de repos, nous nous étions occupés des moyens de traverser le Paga-Gol. Une famille chinoise ayant obtenu du roi des Ortous le privilège de transporter les voyageurs, nous avions dû nous aboucher avec le patron de la barque. Il s'était chargé de nous conduire de l'autre côté, mais nous n'étions pas encore d'accord sur le prix du passage ; on exigeait plus de mille